Fabrice Hyber
Le Château Pédesclaux a confié à l’artiste Fabrice Hyber la création d’une série de peintures pour ses salons de réception.
Cette collaboration unique donne naissance à une rencontre fascinante entre l’art contemporain et l’univers de la vinification.
L'équipe
Première pièce du panorama, L’équipe est un tableau rassemblant toutes les hypothèses de recherche sur le cycle de fabrication du vin. Il met en évidence la combinaison des éléments naturels et des facteurs humains. L’analogie formelle entre la grappe de raisin et un bouquet de ballons rappelle combien l’esprit d’équipe du Château Pédesclaux est lié à une histoire humaine, la passion rugbystique de la Famille Lorenzetti.
Au centre du tableau, les ballons assemblés forment une grappe qui évoque d’emblée celle du raisin fraîchement coupé. Gonflés d’eau, de sucre, de ciel, les grains bleus donnent le tournis comme s’ils s’échappaient, prêts à parcourir le tableau, hommage vibrant à l’équipe qui orchestre inlassablement et avec ferveur les partitions du vin dans le laboratoire construit pour elle : la cave est en effet le lieu de cet art si particulier, dont la seule crue acceptable est le surplus de liquide dans les cuves. Ce tableau déploie un véritable carnet de notes qui évoquent les ingrédients nécessaires à disposition de l’équipe. Fluides, mais aussi instruments, matières, formules, constituent la première poésie du vin. Le premier principe reste le plaisir captateur de lumière colorée. L’invention du vin se joue chaque fois que coule le « juxe », jus et luxe assemblés ensemble. Si une cave est une équipe, elle accomplit des miracles « gorgés de jus », est-il écrit en rouge à côté de l’entonnoir magique, lui aussi saignant. Des mains au bout desquelles se sont posés des grains créent une topologie inattendue. Le fruit mûr deviendra fontaine. Comme dans le football, l’équipe dans la cave est composée d’une bande d’équilibristes joyeux mais aussi savants ; ils font usage de leurs mains comme de leur pensée, ils sont les gardiens d’un jeu rendu visible dans les secrets du soleil vert, comme les feuilles, comme un visage (qui s’agite minuscule et tout en bas du tableau) d’où jaillit par chaque trou un jet salvateur et fécond.
Barrique planetaire
La Terre est un vaste terrain de fermentation. Elle revêt la forme d’une barrique, plongée dans un univers où les planètes se transforment en grains de raisin agrandis à l’échelle cosmique.
Bien-être
Le maître de chai, plongé dans la barrique, évoque les techniques ancestrales de la vinification. Un vigneron expérimenté, régisseur et gardien des secrets, invoque la part savante du savoir-faire face aux caprices plus aléatoires de la nature (la douelle en bois de la barrique adopte la courbure de la Terre).
Vin quantique
Le développement du raisin répond au cycle naturel des expositions à la lumière. Le parcours annuel du soleil autour de la Terre évoque la forme d’une grappe de raisin. Pourquoi « quantique » ? Parce qu’à chaque nouvel élément qui entre en jeu (comme un changement de luminosité, une averse violente, une période de chaleur intense), il redéfinit la formule du vin. Le vin n’est pas statique. La physique quantique (par opposition à la théorie de la relativité) intègre la vie dans toutes ses variations.
La vie quantique est créatrice de fables. Ainsi la recherche s’incarne-t-elle dans le vin, découvrant sans cesse de nouvelles lois, des formules oubliés, des territoires qu’on n’avait pas encore étudiés, les ingrédients à leurs différents stades sont étudiés avec une minutie impatiente, on décortique et l’on recompose de façon novatrice, professionnelle et précise. Rien n’est mineur, la vie matérielle se fond aux légendes, la griffe imaginaire frôle le fruit. On peut comparer cette suite d’opérations aux multiples visions que nous offrent le paysage et le monde : ainsi on peut regarder le soleil mais aussi scruter la lumière ou les photons pour connaître le mouvement du soleil. Ici les photons traversent la terre, et cette vision suffit à rendre dynamique le parcours de l’astre noir ou coloré.
Construit selon un dispositif graphique qui rappelle le cadran solaire, le tableau devient à son tour solaire, recouvrant la planète, découvrant les définitions successives d’un paysage à 360 degrés. Tout bouge, plisse dans la lumière, se multiplie, résistant au moindre souffle, convoquant des révolutions précieuses, des enchantements qui vont et viennent, traductions de l’humide, géographie turbulente.
Fabrice Hyber a réalisé onze toiles qui, assemblées, composent un paysage panoramique. Ce paysage n’est pas une simple représentation du domaine, mais une véritable exploration du « BIO-TOP » de Pédesclaux, un concept qui englobe l’ensemble des éléments naturels et humains qui contribuent à la création du vin.
L’artiste utilise son langage pictural unique pour traduire la complexité du processus de vinification. Couleurs, textures, formes et symboles se combinent pour créer une expérience visuelle qui évoque les différentes étapes de la transformation du raisin en vin.
Biotope
Une grappe en forme festive de ballons de baudruche. L’équipe viticole et les œnologues associés au Château (ils sont une vingtaine en période normale à Pédesclaux) se retrouvent dans la joie des vendanges, moment de culmination d’une saison qui a réuni patiemment les compétences techniques du cycle de production.
Les vases commmunicants
Le vin est d’abord une vigne. Le Château commence donc par l’architecture du cep, intimement liée à son milieu ambiant (arc-en-ciel, atmosphère, courants d’air et d’eau). Respecter le raisin, c’est d’abord identifier les circuits vertueux de nutrition de son biotope. Le cep de vigne fait penser à un réservoir qui récupère l’eau par capillarité, métaphore des liens étroits qui unissent les éléments, terre, ciel et eau.
C’est délibérément contre les lois de la perspective que se déploie la grammaire de ce tableau baroque, dont les récits, multiples, dansent littéralement sur les surfaces peu soucieuses d’économie. Un cep de vigne est un drôle de miracle. Il absorbe les eaux de la mer et de la Garonne qui vibrent en contrebas. Les feuilles du cep provoquent des hallucinations, elles deviennent des réceptacles, des ronds dans l’eau ; au fond des eaux, le cep pousse telle Viviane. Car l’histoire de ce tableau repose sur les principes d’une royauté qui se partage. Comme dans l’invention d’une famille où l’on apprend, où l’on diffuse une connaissance. Tout semble calculé pour vivre en autarcie. La cave est un royaume. Dans sa bulle verte, un poisson cherche l’air ; à la gauche du tableau, des hommes, des ombres forment des conciliabules, des notes semblent avoir été griffonnées à la hâte, on glisse ainsi, comme si l’on observait les différents stades de la confection du vin, et on les réinventait. Un personnage, avec une fraise, porte les germes de ces savoirs. Dans le coin gauche, un moine témoigne de la présence des rares breuvages dans l’enceinte des abbayes. Un paysage se construit où se mêlent eau, ciel et terre ; une perspective irréelle pousse désormais, provoquant vertiges, magie, et visions inédites. Deux êtres fantômes (deux grains de raisin ?) doublent chacun leur tête d’une bulle-auréole. Des anges ? des visiteurs d’un autre temps ? Le grain frissonne, revendiquant son droit inaliénable à l’insolence.
Le jour l'été
L'hiver la nuit
Le vin du passé
Le vin du futur
Fabrice Hyber s’inspire de la tradition ancestrale de la vinification, mais aborde celle-ci avec un regard novateur. Il tisse des liens entre l’art et la science, la biologie, la géologie et l’astronomie, soulignant ainsi les multiples dimensions du « BIO-TOP » de Pédesclaux.
L’œuvre de Fabrice Hyber invite le visiteur à plonger dans l’univers du Château Pédesclaux et à découvrir la richesse et la complexité du processus de création du vin. C’est une invitation à une expérience sensorielle et intellectuelle unique, où l’art et la vinification se rencontrent pour célébrer la beauté et le mystère de la nature.
Nuanciers
Sous la forme d’un diptyque, la déclinaison des couleurs du raisin et du vin. Elles ne sont pas identiques, rappelant le travail chromatique de la fermentation. La couleur du raisin varie autour du bleu indigo, avec des variations subtiles de teintes selon le jour et la nuit. La couleur du vin oscille autour d’un rouge grenat, une teinte composée de pigments naturels réputée pour la densité sombre de ses reflets.
Certains tableaux et certains raisins s’épousent secrètement. Un lien les rassemble, construisant des histoires parfois difficiles à comprendre, parfois d’une désarmante simplicité. Des sonorités les composent. Des mots les accompagnent. Des chants les portent. Il fallait ici montrer la palette des couleurs, révéler les nuances du raisin noir et du vin rouge. Les apprécier. Les comparer. Les goûter. Reconnaître les savoir-faire des uns et des autres. Deux toiles, un diptyque, se partagent cette hymne aux couleurs. Comme dans les techniques de l’aquarelle, la transparence permet de révéler les mystères et les activités de la cave. Mais aussi souligner la place qu’occupe l’évaporation (La part de l’ange n’est jamais loin). Au commencement, la grappe trouve sa géographie dans une infinité de carrés colorés et juteux. Cela coule sur les couleurs. Les nuances de raisins noirs et de raisins rouges se partagent le territoire des tableaux. Puis les noirs virent au bleu, connaissent des mutations, se dédoublent, se séparent. Pour s’abandonner et se transformer jusqu’aux rouges qui envahissent les prés, les taillis, les écrans stimulés par les jus luxueux comme les pluies abondantes. Il reste du liquide en nous. Gravitant autour du bleu, du gris, du gris bleu, du rose, du gris rose, du rouge. Émouvantes couleurs, veines généreuses, joyeuses, vitales.